Le triomphe lyonnais de Sylvain Cachard

Il n'avait jamais couru 80 km et, à l'arrivée, c'est lui qui l'a emporté. Pour son baptême sur la SaintéLyon et sur une telle distance, Sylvain Cachard s'est imposé devant Virgile Moriset et Pierre Defontaine. À 26 ans, le Grenoblois aux multiples titres en course en montagne poursuit sa mue vers le trail avec ambition, avide "d'expérience".

Extra D+
5 min ⋅ 02/12/2025

Salut, c’est Franck Berteau de Distances+,

La 71e édition de la SaintéLyon a tenu toutes ses promesses malgré des températures relativement clémentes — environ 10°C au départ, à Saint-Etienne — pour un événement réputé pour son froid mordant et ses conditions parfois dantesques. Distances+ était sur le parcours grâce au soutien de Go’Lum et Wise.

Au bout de la nuit, ce sont Sylvain Cachard et Adeline Martin qui ont dompté le plus rapidement cette Doyenne, deux athlètes aux parcours très différents que vous pourrez découvrir plus en détails dans ce 20e numéro de notre newsletter Extra D+.

Merci d’y être fidèle et bonne lecture !

+ À Lyon, Sylvain Cachard passe un cap +

Au fil de la saison dernière, Sylvain Cachard avait confié à Distances+ son ambition de franchir un palier. De grandir en traileur après avoir largement fait ses preuves en tant que coureur en montagne avec, à son actif, trois sacres consécutifs de champion de France (2020, 2021, 2022) et un autre de champion d’Europe de montée-descente, en 2022, à El Paso (Espagne).

Des blessures avaient alors freiné ses ardeurs, l’obligeant notamment à renoncer aux championnats d’Europe de course en montagne à Annecy (Haute-Savoie), en juin 2024, où il aurait aimé défendre son titre et clore définitivement ce chapitre de sa carrière. Ces aléas ne l’avaient en revanche pas empêché, en août, d’améliorer de près de deux minutes son record à Sierre-Zinal (2 h 32 min et 45 sec pour 31 km et 2200 m D+), qui constitue toujours la meilleure performance française de tous les temps sur la course suisse.

Dimanche, au coeur de la nuit lyonnaise, l’athlète de 26 ans a peut-être décroché une sorte de passeport vers l’avenir dont il rêve. Pour son baptême sur la SaintéLyon, et sa première sur une telle distance, Sylvain Cachard s’est imposé en 5 h 36 min avec patience puis décomplexion, dominant d’autres favoris tous plus expérimentés que lui sur ce type de format — Virgile Moriset (2e), Dimitri Morel-Jean (5e), Hugo Deck (6e), Antoine Charvolin (DNF), Benjamin Polin (DNF).

© Nicolas Fréret / Distances+© Nicolas Fréret / Distances+

Jamais trop loin des avant-postes — 8e dès le premier ravitaillement, à Saint-Christo-en-Jarez — le Grenoblois s’est dit, au micro de Distances+, à la fois “surpris d’avoir été capable de courir 80 km” à ce niveau d’intensité, et satisfait d’avoir rempli son objectif principal, à savoir “prendre de l’expérience” pour la suite.

Dauphin de Frédéric Tranchand lors des championnats de France de trail court, en juillet, à Val d’Isère, Sylvain Cachard s’est ensuite classé 9e des Mondiaux de Canfranc — et médaillé d’argent par équipe, en Espagne, fin septembre. Il est ensuite allé remporter le Marathon des Causses (36 km et 1600 m D+), lors du Festival des Templiers, à Millau. Une épreuve qu’il avait déjà gagnée en 2019, durant sa période coureur en montagne. Une époque désormais révolue.

+ Adeline Martin assume son statut +

Elle avait annoncé venir pour la victoire. Elle s’y est tenue. Grande favorite de cette 71e édition de la SaintéLyon, Adeline Martin a franchi la ligne d’arrivée en première position après avoir fait la course en tête durant 6 h 42 min. 2e l’an passé derrière Marie Goncalves lors d’une nuit perturbée par des problèmes gastriques, l’athlète du team Kiprun n’a pas caché sa satisfaction d’inscrire son nom au palmarès de la Doyenne.

© Nicolas Fréret / Distances+© Nicolas Fréret / Distances+

Le sien, de palmarès, n’en est pas à ses premières lignes. À 41 ans, la Roannaise a démarré sa carrière sur la route, en remportant notamment en 2010 un premier titre de championne de France de marathon. Avant de se laisser séduire par les sentiers, et de réaliser un doublé en 2017 en devenant, à quelques jours d’intervalle, championne de France de course en montagne puis championne du monde de trail, en Italie.

Cette année, Adeline Martin a encore ajouté à son CV plusieurs occurrences. Vainqueure en début de saison du Trail du Ventoux (48 km et 2600 m D+), du Grand Raid Ventoux by UTMB (49 km et 2200 m D+) ainsi que du Pilatrail (42 km et 2400 m D+), elle avait dû abandonner lors des championnats de France de trail court, à Val d’Isère, obtenant tout de même sa sélection pour les Mondiaux de Canfranc (Espagne). 20e lors de cette épreuve, et 3e française, la future gagnante de la SaintéLyon avait ainsi participé à l’obtention de la médaille de bronze par équipe des tricolores.

En octobre, une chute au départ du Grand Trail des Templiers — qu’elle avait achevé à la 3e place — l’avaient contrainte à couper l’entraînement durant deux semaines, avant de se focaliser sur la classique nocturne, qui lui tenait à coeur. Au micro de Distances+, Adeline Martin a affirmé ne pas exclure de revenir dans les années suivantes. Pourquoi pas pour s’aligner sur un des relais de la SaintéLyon, à l’image de ses coéquipières de l’équipe de France de trail, Marion Delespierre, Hillary Gerardi et Anne-Cécile Thévenot, qui ont remporté le relais en trio en terminant 6e au scratch.

+ Corentin Play, symbole et performance +

Pour Corentin Play, la SaintéLyon prend depuis deux ans des airs de phare en pleine tempête. Une lumière pour garder le cap, lorsque le sort s’acharne. En 2024, quelques semaines avant de signer une 9e place sur la Doyenne, l’athlète de 30 ans et sa femme avaient accueilli un deuxième enfant, une petite fille née très prématurément. En octobre dernier, l’histoire s’est répétée, avec la naissance de Charlotte après à peine six mois passés dans le ventre de sa mère.

Sur ses réseaux sociaux, le coureur du team Wise documente cette épreuve à part entière. Il raconte comment courir l’aide à conserver “un peu de contrôle dans une vie chahutée”. Le dilemme que représente le fait de partir s’entraîner pour “souffler” et “évacuer le stress”, au pied de l'hôpital où sa fille prend des forces, alors que chaque minute compte à ses côtés. “Je ne cours pas malgré tout ce que nous vivons, écrit-il. Je cours avec tout ce que nous vivons.”

Quelques jours après la naissance de Charlotte, déjà, le pompier avait choisi de tout de même s’aligner sur le Grand Trail des Templiers, achevant ce 80 km et 3400 m D+ en 8e position. Un résultat honorable au bout d’une saison remarquable, avec une victoire sur le 135 km (5200 m D+) du Trail du Saint-Jacques by UTMB et une 3e place sur l’EcoTrail de Paris (81 km et 1200 m D+).

Dans la nuit de samedi à dimanche, Corentin Play a bouclé la SaintéLyon 2025 au pied du podium, à la 4e place, en tombant dans les bras de son épouse après 5 h 58 min de course. “Cette SaintéLyon, je ne la prends pas comme une performance, mais comme un symbole, avait-il partagé avant l’évènement sur son compte Instagram. Un symbole de résilience, de combativité, de paternité, de sens.” Force est de constater qu’au-delà du symbole, la performance était, elle aussi, au rendez-vous.

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Par Distances+

Distances + est un média journalistique, spécialisé dans le trail running.

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